Un examen de génétique constitutionnelle postnatale consiste à analyser les caractéristiques génétiques héritées ou acquises à un stade précoce du développement prénatal. (Article L. 1130-1 du code de la santé publique).
Cette analyse a pour objet (Article R. 1131-1 du code de la santé publique) :
- Soit de poser, de confirmer ou d’infirmer le diagnostic d’une maladie à caractère génétique chez une personne ;
- Soit de rechercher les caractéristiques d’un ou plusieurs gènes susceptibles d’être à l’origine du développement d’une maladie chez une personne ou les membres de sa famille potentiellement concernés ;
- Soit d’adapter la prise en charge médicale d’une personne selon ses caractéristiques génétiques.
Les examens de génétique tumorale somatique et les examens réalisés dans le cadre du don (notamment analyses HLA dans le cadre de la greffe) sont en dehors du champ de la loi de bioéthique et donc de ce rapport annuel d’activité.
Différentes techniques permettent d’analyser ces caractéristiques génétiques. Si l’anomalie génétique est visible au niveau du chromosome, les techniques utilisées seront le plus souvent des techniques de cytogénétique (caryotype) y compris de cytogénétique moléculaire (hybridation in situ fluorescente : FISH). Si l’anomalie se situe au niveau de la molécule d’ADN, du gène, une technique de génétique moléculaire sera préférentiellement employée. Cette frontière, autrefois franche entre cytogénétique et génétique moléculaire, tend à disparaitre avec l’avènement de techniques qui permettent d’appréhender des remaniements chromosomiques au niveau moléculaire : analyse chromosomique par puce à ADN (ACPA), techniques de séquençage à haut débit aussi appelées séquençage de nouvelle génération (NGS pour Next Generation Sequencing), ou encore séquençage massif en parallèle car permettant de tester plusieurs gènes dans une seule technique (panels de gènes).
Deux plans de santé publique, le Plan National Maladies Rares (PNMR) et le Plan France Médecine Génomique (PFMG) influencent la pratique de la génétique en France et impactent l’activité des laboratoires.
Ce rapport d’activité de génétique postnatale constitue un outil important pour connaitre les pratiques et les besoins, notamment dans le cadre de suivi des PRS (projet régional de santé) et du PNMR. Ce rapport, unique en Europe, est en constante évolution pour s’adapter à l’évolution des pratiques.
La nouvelle loi de bioéthique du 2 Août 2021 n’a pas eu d’impact sur la pratique de 2023 car le décret d’application en matière d’examen des caractéristiques génétiques n’a été publié qu’en décembre 2023.
Les données de génétique postnatale présentées dans ce rapport correspondent à l’activité des laboratoires pour l’année 2023.
Depuis 2009, année du premier recueil par l’Agence de la biomédecine des données relatives à l’activité des laboratoires de génétique, cette discipline a considérablement évolué. L’introduction successive des panels de gènes, de l’exome, puis du génome a complexifié la structure du rapport annuel d’activité. De plus, la révision de la loi de bioéthique accompagne de nouvelles pratiques qu’il est crucial de suivre, notamment les examens réalisés en situation post-mortem et les données incidentes.
Dans ce contexte, l’Agence de la biomédecine a constitué un groupe de travail réunissant divers acteurs des laboratoires de génétique : l’Association nationale des praticiens de génétique moléculaire (ANPGM), les professionnels du réseau NGS, l’Association des cytogénéticiens de langue française (ACLF) pour la cytogénétique, le réseau Achro-Puce pour la CGH-array, ainsi que des experts en pharmacogénétique. Ce groupe de travail a proposé une évolution du rapport d’activité, plus adaptée aux pratiques actuelles de la génétique.
Évolution des modalités de recueil des données
Dans le but d’améliorer la précision des informations collectées, une nouvelle modalité de recueil des données a été mise en place. Jusqu’à présent, les données des laboratoires étaient collectées sous forme agrégée, c’est-à-dire que chaque laboratoire transmettait une synthèse globale des examens réalisés. Désormais, le recueil s’effectue de manière individuelle : l’examen le plus couvrant est documenté avec ses indications, ses résultats et sa technique. Cette évolution vise à mieux appréhender le lien entre l’indication initiale, la technique et les résultats des examens génétiques réalisés. Pour les laboratoires qui n’ont pas été en mesure de modifier leurs systèmes d’information, l’Agence a maintenu la possibilité d’une transmission de leur activité de manière agrégée.
En parallèle, une collecte de données agrégées sur l’activité globale des laboratoires, regroupant l’ensemble des examens réalisés pour chaque individu, est également menée afin de fournir une description complète de l’activité nationale.
Pour harmoniser les déclarations et approfondir la compréhension des indications cliniques ayant conduit à la réalisation des examens, un thésaurus a été élaboré en collaboration avec les représentants biologistes des filières de maladies rares, de pharmacogénétique, d’oncogénétique et d’immunogénétique. Ce référentiel a été partagé avec l’ensemble des laboratoires.
Le recueil des données pour l'année 2023
L’analyse de l’activité de génétique postnatale pour l’année 2023 repose sur deux sources de données : les remontées agrégées et les remontées individuelles. Les données des gènes rapportées utilisent la nomenclature standardisée du HUGO Gene Nomenclature Committee (HGNC), garantissant une identification unique de chaque gène. Cependant, la qualité des données reste hétérogène, et certaines informations ont été exclues pour éviter les doublons.
En 2023, 99 % des laboratoires (204 sur 206 attendus) ont transmis leurs données, dont 75 % sous forme individuelle, ce qui représente une nette amélioration par rapport à 2022.
En cytogénétique, 87 % des laboratoires ont transmis des données individuelles, contre 70,2 % en 2022. Cinq centres n’ont pas transmis de données individuelles, et un centre n’a transmis aucune donnée.
En génétique moléculaire, où les données sont plus complexes, 68,3 % des laboratoires (contre 50,8 % en 2022) ont réussi à fournir des données individuelles. Deux centres n’ont transmis aucune donnée, et quatre laboratoires, bien qu’attendus pour transmettre des données individuelles, n’ont pas pu le faire.
L’analyse de l’activité a mis en lumière certaines limites. A titre d’exemple, les données concernant le parcours postnatal des cas de trisomie 21 sont souvent incomplètes, ce qui limite l’interprétation. Parmi les cas étudiés, 40,5 % ne disposaient pas de résultats de caryotype, et 23,5 % comportaient des informations manquantes concernant les résultats du caryotype et du dépistage prénatal. Pour la trisomie 21, comme pour tous les examens, seule une remontée systématique et exhaustive des données permet de garantir une évaluation précise et pertinente.
Par ailleurs, la qualité des données transmises reste variable. Pour garantir une analyse représentative, seules les informations communes aux deux modalités de collecte (agrégée et individuelle) et de qualité suffisante ont été retenues. Un travail continu avec les éditeurs de logiciels et les laboratoires est nécessaire pour améliorer la qualité des informations pour les rapports futurs. Ces efforts permettront de mieux suivre les évolutions des pratiques.
Enfin, ce rapport se limite aux examens prescrits en France, les examens réalisés à l’étranger ayant été exclus autant que possible des analyses, de même que les examens réalisés dans des collectivités d’outre-mer (COM), pour lesquelles la règlementation diffère.
Le tableau POSTNATAL1 précise le champ des examens réalisés par les laboratoires ayant déclaré une activité à l’Agence de la biomédecine. À noter qu’un même laboratoire peut réaliser des examens de génétique moléculaire et de cytogénétique. Par ailleurs, pour les examens de génétique moléculaire, l’autorisation peut être limitée. Dans cette dernière situation, l’activité peut être limitée à un ou plusieurs examens, de réalisation et d’interprétation généralement plus simples, et qui nécessitent une expertise spécifique (exemple en hématologie, pharmacologie).
Les deux cartes de la figure POSTNATAL1 montrent la répartition géographique des laboratoires sur le territoire français. Les prélèvements sont susceptibles d’être expédiés, certains laboratoires proposant un diagnostic d’expertise pour l'ensemble de la France.
Le diagramme de la figure POSTNATAL2 présente la répartition par origine géographique des prescripteurs : proportion d'examens génétiques réalisés pour 100 habitants.
Cette répartition n’est pas homogène sur le territoire, avec en particulier un déficit de prescripteurs dans les territoires d’outre-mer. Une analyse plus poussée sera nécessaire pour savoir si les habitants ultramarins bénéficient de prescriptions par l’intermédiaire de coopérations de prescripteurs métropolitains.
Il est intéressant de noter que la Corse dispose d’un bon accès à la prescription. Cette cartographie sera complétée dans le cadre des fiches régionales.
Figure POSTNATAL 1. Répartition géographique des laboratoires de cytogénétique et de génétique moléculaire postnatale ayant déclaré une activité en 2023
En 2023, près de 560 000 personnes ont bénéficié d’un examen génétique constitutionnelle (tableau POSTNATAL2).
L’année 2020 avait été affectée par la crise sanitaire liée au Covid-19 avec une diminution de 8,2 % du nombre d’individus testés. En 2021, on avait observé un rattrapage important de l’activité avec une augmentation de 16 % des personnes bénéficiant d’un examen génétique. Cette augmentation a été considérée comme un effet de l’épidémie COVID, l’activité se tassant en 2022 et reprenant la courbe de progression attendue.
En 2023 le nombre d’individus bénéficiant d’un examen génétique a légèrement augmenté (+2,9%) par rapport à 2022.